Depuis le 2 février 2022, les entreprises ne sont plus tenues d’imposer un minimum de 3 jours de télétravail à leurs employés. Les règles, qui ont été assouplies par le gouvernement de Jean Castex, sont désormais de simples recommandations de travail à distance.
Il est certain que les confinements successifs et la période de pandémie de COVID-19 a métamorphosé le monde du travail, mais l’a aussi profondément divisé : on oppose désormais les pros télétravail et les antis. Ce mode de travail alternatif qui ne fait pas toujours l’unanimité, qu’il s’agisse des employeurs ou des employés d’ailleurs, a été source de profonds bouleversements sur le marché immobilier et plus spécialement en Île-de-France.
C’est des impacts sur ce marché géographique spécifique qu’il sera question dans cet article.
Selon l’INSEE, en 2021, en moyenne chaque semaine, 56 % des salariés habitant à Paris et 36 % de ceux habitant dans le reste de l’Île-de-France ont télétravaillé. On note également que parmi les cadres résidant à Paris et ayant travaillé au moins une heure dans la semaine, 74,5 % ont télétravaillé.
C’est dire l’impact considérable que cela a pu avoir sur la vie quotidienne des habitants de ce secteur géographique et par conséquent sur le marché de l’immobilier.
Ainsi, ces deux dernières années, nous avons vécu une vague de départ « au vert », les télé-travailleurs ayant souhaité exercer dans un environnement dit plus agréable. Trouver un logement plus grand, plus lumineux, plus adapté au télétravail était devenu une priorité pour bon nombre. Certains ont revendu leurs biens et ont quitté la région, d’autres l’ont conservé et ont recherché un pied-à-terre, une résidence secondaire temporaire dans un secteur proche ou bien plus éloigné parfois.
Depuis la fin du télétravail obligatoire en février dernier, un certain nombre de salariés a souhaité retrouver un mode de travail dit conventionnel, ou en présentiel, déplorant un manque d’interactivité avec les collègues et une solitude parfois trop pesante. Ces derniers sont donc rapidement revenus sur Paris et sa région, pour travailler en présentiel au sein de leur entreprise, à temps partiel ou à temps plein.
Mais les besoins en matière de logement ont évolué : que les salariés travaillent en présentiel ou à domicile, la plupart demandent désormais un environnement agréable. Une belle luminosité, de l’espace voire même un extérieur sont devenus l’une des principales motivations d’achat.
Les logements attractifs doivent dorénavant pouvoir proposer un espace dédié au travail, un lieu fonctionnel et confortable. Des entreprises spécialisées qui fabriquent des meubles ou des espaces sur-mesure spécifiquement pour le télétravail fleurissent d’ailleurs.
La construction de logement neuf saura très certainement s’adapter rapidement à ces nouveaux besoins. Les règles de construction qui imposent de respecter les normes environnementales, les permis de louer dans certains secteurs qui induisent des logements décents et conformes, les aides de l'État pour la rénovation des logements anciens permettront d’améliorer et de transformer de nombreux logements selon les nouvelles demandes des acheteurs.
Il est à noter que l’impact sur le résidentiel, en volume de ventes, est resté stable ces dernières années. Bien que de nombreux citadins aient décidé de partir (9,6 % de la population parisienne aurait quitté Paris entre novembre 2020 et octobre 2021), ils ont été compensés par de nombreux nouveaux arrivants. La demande en Île-de-France en général est restée très forte, c’est un marché toujours aussi prisé. Les prix se maintiennent, même si une tendance à la baisse se dessine dans certains secteurs depuis peu.
L’impact sur le marché immobilier d'entreprise
L’impact du télétravail sur le marché de l’immobilier le plus notable est sans doute sur le marché d’entreprise.
En effet, l’accroissement du nombre de télétravailleurs ces dernières années a conduit les entreprises à mener une réflexion sur leurs besoins réels en termes de surface de travail et notamment concernant les surfaces de bureaux. C’est un poste de dépenses très important, notamment en Île-de-France où le prix du mètre carré est élevé. Le contexte économique difficile nécessitant aussi toutes les économies possibles pour bon nombre d’acteurs professionnels.
En Île-de-France, où le nombre de télétravailleurs est un des plus importants de France, le marché d’entreprise, et notamment des bureaux, a nettement reculé. Il souffre profondément de la crise et de ses conséquences. De nombreux bureaux sont désormais vacants et entraînent un ralentissement du marché. Les entreprises doivent souvent se réorganiser, s’adapter ou partir.
Ce ralentissement est toutefois en partie compensé par la création importante de nouvelles entreprises, notamment les start-up, qui cherchent à rester localisées sur un secteur central, dans ou proche de la capitale qui leur confère une renommée et un certain standing pour leurs clients et leurs investisseurs.
Aussi, pour certains secteurs, notamment les quartiers d’affaires, la demande reste plus forte que l’offre et de nombreux bureaux sont désormais proposés à la sous-location. Les lieux de coworking sont aussi en plein essor.
On note également une mutation dans la demande. Tout comme pour le marché immobilier résidentiel, les entreprises et leurs salariés souhaitent désormais un lieu de travail moderne et convivial. En Île-de-France, terre de bureaux par excellence en France, les espaces à l’américaine, et notamment à la « Google » sont en forte demande.
Depuis la fin du télétravail obligatoire en début d’année, les salariés revenus à temps plein ou ceux qui fonctionnent sur un mode hybride, mi domicile - mi entreprise, attendent des espaces différents : plus axés sur l’humain et moins sur la rentabilité brute. Les nouveaux besoins impliquent des espaces plus ouverts associés à des « cocons » de travail où ceux qui le désirent peuvent se concentrer seuls en toute intimité. L’espace de travail doit être davantage collaboratif, plus axé sur la confiance et sur l’équilibre entre le bien être individuel et la productivité.
Le marché du bureau en Île-de-France qui a pâti ces dernières années d’investissements grippés, de baisses de chiffre d’affaires, de nouvelles demandes des salariés et de leurs employeurs a donc de nombreuses perspectives d’évolution pour l’avenir.
Il est à noter que la fin du télétravail pourrait inciter certains professionnels à chercher des opportunités d'emploi en dehors de l'Ile-de-France, tandis que d'autres pourraient opter pour des emplois en télétravail indépendant, tels que ceux proposés sur des plateformes comme Jooble.
Le marché du travail a nettement changé ces dernières années. Le télétravail en est l’une des principales évolutions et cela a entraîné des impacts conséquents sur le marché de l’immobilier résidentiel et d’entreprise. Tantôt en ralentissement, tantôt en plein essor, selon la période et le secteur, le marché de l’immobilier en Île-de-France évolue et se transforme. Les disparités vont aller crescendo entre les logements ou les espaces professionnels restés « dans leur jus », non modernisés et les lieux qui auront su prendre le tournant du futur, plus flexibles, plus attractifs.